top of page

La Mare aux Nanars : The Room

  • Photo du rédacteur: Daniel Venera
    Daniel Venera
  • 16 mars 2018
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 22 oct. 2019

A l’occasion de la sortie de The Disaster Artist, retour sur le film originel : The Room, un nanar ultime à voir absolument.

J’ai eu la chance de voir The Room au Grand Rex en présence de :

  • Tommy Wiseau, acteur/scénariste/producteur et réalisateur. Un style rock, une longue chevelure, des dizaines de ceintures qui pendouillent au pantalon. Il lève les bras, harangue la foule avec un accent mi-slovaque mi-bourré. L’animateur lui pose les questions du public. « Ed Wood ? Rien à foutre. Question suivante. ». « Pourquoi cette affiche ? Bah j’ai des yeux bizarres … c’est cool ». Et il part faire des passes de football américain avec un mec du public.

  • Greg Sestero, acteur et producteur executif. Tout calme, il traduit en français l’anglais incompréhensible de son « pote » Wiseau. Le pauvre.

On nous briefe sur les différents jeux pendant la séance. Quand on voit une cuillère, on s’envoie des cuillères en plastique. Un personnage dit « Hi ! » on répond « Hi !». Quand on voit des plans de San Francisco, on crie « SAN FRANCISCO ! ». Grosse ambiance au Grand Rex, à l’instar des soirées Nanarland.


Malheureusement, je n’ai pas apprécié ce ratage. Car oui, c’est sûrement le pire film que j’ai vu de ma vie. J’avais besoin de le savourer.

Je l’ai revu. Seul. Au calme. Je n’ai jamais pris autant de notes pendant un film. Chaque instant est un bijou.


Il FAUT le voir. Les meilleurs films sont « à voir ». Pourquoi pas les pires ? Entre les soirées nanardes et autres Razzie Awards, le cinéma est la seule industrie à célébrer ses pires créations. Profitons-en !

The Room compile tout ce qu’il ne faut pas faire au cinéma. C’est donc une excellente école pour tout cinéaste. Aussi, le jeune auteur décomplexe : « mon premier film ne sera pas pire que The Room … même si je le fais exprès. ».


Pour ce premier épisode de « La Mare aux Nanars », je te fais une liste non-exhaustive des ratages du film. Bien sûr, c’est sans spoil. Je ne pointe pas toutes les erreurs. Ce serait trop long. Et mieux vaut garder la surprise au visionnage ;)


Enjoy !


SCRIPT

Le script original est dispo ici


Résumé : Johnny est amoureux de Lisa. Mais elle ne l’aime plus et couche avec Mark, le meilleur ami de Johnny. Triangle amoureux. Drame. Voilà voilà.


Théâtre filmé Le cinéma est un art visuel. Il doit montrer par l’action et non expliquer par le dialogue : « Show, don’t tell ». Wiseau, lui, écrit une pièce de théâtre (ou une sitcom). Des personnages entrent et sortent de l’unique décor, bavardent à l’infini.


Remplissages et répétitions Wiseau veut un long-métrage, mais n’a pas d’histoire. Alors :

  • Il met tout sur « repeat ». « Hi » et « Bye », mais aussi « Don’t worry », « He's my best friend » ou encore « I don’t love him » sont omniprésents dans le vocabulaire de The Room. Les sept scènes de sexe raccoleuses sont recyclées. Pendant les 30 premières minutes, The Room est un film érotique. Les stock-shots de San Francisco se répètent par dizaines. Le comble du remplissage est d’avoir un personnage qui raconte une histoire … déjà vue plus tôt à l’écran (le voisin qui récupère son slip chez Johnny).


  • Il crée des scènes inutiles ... Johnny et Mark jouent au ballon. Johnny et Mark prennent un café. Johnny va acheter des fleurs. Un couple random couche sur le canap’ de Johnny.


  • ... et des personnages inutiles La mère de Lisa : « Qu’est-ce que ces personnages font là ? », comme si elle était spectatrice de The Room. Ou encore : « Combien de personnes rentrent et sortent de cet appartement ? » Peter (le pote/psychologue/boulet) : « Y’a trop de gens bizarres ». Mark, en parlant de sa relation adultère avec Lisa : « Je regrette d’avoir fait ça. ». De quoi ? D’avoir joué dans The Room ? Pardon, je m’égare dans le méta. Reprenons.


Personnages sans volonté Mark : « Je ne peux pas coucher avec toi Lisa, Johnny est mon meilleur ami ». 20 secondes plus tard, ça baise dans les escaliers. La fois suivante : « Je l’ai trahi. On ne peut plus coucher ensemble ». 10 secondes plus tard, ça se pelote sur le canap’ de Johnny.


A côté de la plaque Surprenez le spectateur ! Ayez des personnages aux réactions insolites ! Mark raconte une histoire sordide de tromperie et de meurtre ? Johnny éclate de rire : « What a story Mark ! ». La mère annonce à sa fille son cancer ? « Don’t worry mom », dans le plus grand des calmes.

Johnny parle boulot et d'un coup : « Anyway, how’s your sex life ? ».


Clichés Surtout sur les femmes. La mère dit à sa fille de profiter de l’argent de Johnny. L’amour importe peu. Lisa est une nympho/mytho/sociopathe. Elle saoûle Johnny, lui fait l’amour, pour dire le lendemain : « He got drunk last night … and he hit me ».


Musique Le piano est ronflant, tout droit sorti des Feux de l’amour. Les musiques des scènes érotiques sont d’un kitsch absolu (j'adore You’re My Rose). Elles deviennent même inappropriées pendant les scènes d’adultère.


ACTING

« You are tearing me apart Lisa ! »


Wiseau n’a pas décroché un seul casting dans sa carrière d’acteur. Dans The Room, il donne tout. Ou presque.

Dans la fameuse scène « You are tearing me apart Lisa ! », tout y passe. L’incompréhension, la rigolade, la violence physique, la tristesse amoureuse, l’incompréhension again, avant de finir sur une explosion de rage inattendue. « Why are you so hysterical ? » se demandent Lisa et les spectateurs.

Pour le reste du casting, mentions spéciales aux pleurs de Lisa, au regard figé de Mark, au sourire malsain de Denny et au mec random qui fait des leçons de morale.


TECHNIQUE

Wiseau n’est pas le seul à tout foirer.


Cadreur Il se perd (ou s’endort) et réajuste discretos; rate ses mises au point; et panote en tremblotant.


Décor Il doit retranscrire le quotidien des personnages. Là, c’est random. Petite anecdote. Sur le tournage, la table du salon était vide. Le chef déco : « C’est pas possible, il faut la remplir ». Par manque de temps, ils ont mis des photos d’objets (notamment une cuillère !) dans des cadres et les ont posés sur la table. Efficace.


Doublage Wiseau ne connaissait pas ses répliques. Il a surement dû doubler sa propre voix sur certaines scènes. Ce qui donne le ton monocorde d’un gars qui lit un texte.

Idem sur les scènes de sexe : « Wouh », « Ha ! », « Oh ! ». Bref. Vous voyez l’truc.


Effets spéciaux Pourquoi diable ont-ils utilisé un fond vert pour les scènes sur le toit ? C'est dégueu. Ils ne pouvaient pas juste filmer sur un toit ?


Son Sur certaines scènes, les personnages s’entendent plus que d’autres. Exemple : la scène dans le local à poubelles (si c’est bien un local à poubelles).


Costumes

Comme deux gamins, Wiseau et Sestero nagent dans leurs smokings.


Le Hit des Hits

Ma scène préférée


La scène chez la « fleuriste » est l’Everest de The Room.


  • Inutile. Tommy achète des fleurs pour Lisa. On s’en fout.

  • Faux raccord. Le son de claquement de porte arrive avant que la porte claque.

  • Le dialogue non-sensique. Fleuriste : « Oh hi Johnny I didn’t know it was you! » Comment tu peux pas le reconnaître ce mec ? C’est ton « favorite customer » en plus ! 3 longues secondes plus tard, Johnny : « That’s meeee ! »

  • Doublage post-synchro de Wiseau (et de la fleuriste ?). A moins d’avoir tort, et qu’ils jouent juste mal.

  • Faux raccord, le retour. Dans l’axe, entre le moment où la fleuriste salue Johnny et le moment où elle prend les fleurs. Insolite.

  • Ce décor est bordélique. Elle vend quoi cette dame au juste ?

  • Et puis ce chien. Qu’est-ce qu’il fout là ? C’est un bon acteur lui !


Bref. Cette scène est fantastique.


POSTERS


Même les affiches du film sont ratées.

La première montre un Wiseau trèèèèès chelou. On se demande si c’est un film de vampires. Aussi, les lettres inversées de « The Room » font : « The Doom ». C’était voulu ? Non lo so.

La deuxième est une adaptation des Feux de l’amour, avec un weirdo au centre en très TRES gros.

La troisième, c'est un festival.

On fait l’bilan

The Room est jouissif. Et ma liste n’en présente qu’une infime partie. Si tu ne l’as jamais vu, regarde-le (entre potes de préférence). Il va changer ta vie.


Pour aller plus loin

Avec internet, The Room est devenu culte. Il y a une quantité astronomique de memes et de montages sur le film.


Merci d’avoir lu et j’espère que ça t’a plu ! Je te laisse avec un morceau obsédant.


« Bye Bye ! »


 
 
 

コメント


    bottom of page